Cultures et mondes ludiques : Quand le jeu s’invite dans la recherche universitaire – Épisode 2

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Interview de Thierry BURGER-HELMCHEN

  • Peux-tu me préciser ton métier/poste et m’en dire plus sur ton parcours ?

Je suis professeur en sciences de gestion à l’Université de Strasbourg et chercheur au sein du laboratoire BETA (Bureau d’économie théorique et appliquée). J’ai eu un parcours académique des plus classiques, doctorant, maître de conférences puis professeur. Côté recherche, je me suis au départ focalisé sur la finance et l’esprit d’entreprendre, avec d’ailleurs un chapitre sur les jeux vidéo sur ce sujet dans ma thèse. Aujourd’hui mon sujet est le management de l’innovation et de la créativité.

  • Comment as-tu entendu parler de ce groupe de recherche ?

À l’heure du numérique… par le bouche à oreille ! Une collègue m’en a parlé, j’ai pris contact et je me suis trouvé aspiré par la dynamique de l’équipe et la passion du sujet.

  • Es-tu déjà intervenu lors d’une initiative menée par ce même groupe ? Si oui, peux-tu m’en dire plus ?

Oui, j’ai modestement participé à l’organisation d’une master class fin 2018. C’était un peu le moment où l’on officialise l’existence de notre groupe de recherche interdisciplinaire.

Master Class – Play>Think>Upgrade>Replay
Master Class – Play>Think>Upgrade>Replay
  • En quoi créer un tel groupe est-il intéressant et pertinent selon toi ?

Le jeu vidéo est un objet qui mélange de nombreuses perspectives. Évidemment artistiques, avec des questions de designs, de storytelling, mais aussi économiques et managériales. Participer à ce groupe me permet de comprendre des facettes du jeu vidéo, liées par exemple aux aspects culturels (au sens des cultures représentées dans le jeu) ou des aspects plus littéraires sur la manière de faire avancer une narration ludique auxquels je n’aurai jamais été sensibilisé en ne restant qu’avec des collègues économistes ou managers.

  • Qu’as-tu réalisé comme travaux concernant le monde du jeu ? Qu’est-ce qui t’attire le plus à ce sujet ?

Du fait de ma formation, je m’intéresse aux aspects économiques liés aux jeux vidéo tout comme aux étapes de conception/production. Durant ma thèse je me suis intéressé à des très petites entreprises du jeu vidéo (aujourd’hui on parlerait d’indé, mais le terme n’était pas à la mode à l’époque). Ces entreprises étaient confrontées à des défis multiples (innover dans le game design, changer de plateforme, mettre en place la distribution). C’est la conjugaison de ces défis qui rend leur survie délicate.

Plus tard je me suis intéressé à la place des joueurs dans la production des jeux. Que ce soit de la participation au beta test, mais aussi à la création de niveau (modding) ou à la gestion des joueurs dans les MMO, les utilisateurs de jeux créent de la valeur. Les entreprises entretiennent savamment ces communautés pour assurer une vie longue à leurs jeux. Aujourd’hui je m’intéresse beaucoup à la séparation des tâches dans la production des jeux vidéo, avec des studios géographiquement éclatés et de plus en plus spécialisés.

Cela dit, dans le jeu vidéo, tout est passionnant. Par exemple, au dernier salon E3 2019, de nombreux journalistes on émit des critiques car il n’y avait pas d’annonces tonitruantes. Or, pour le chercheur en économie, ce salon a été passionnant. Il marque d’une part l’entrée massive de Google dans le secteur des « plateformes » ce qui va pas mal changer la dynamique des groupes installées (Microsoft, Sony, Nintendo). D’autre part, ce salon a vu la multiplication des annonces d’offres par abonnement. Là encore une modification profonde du modèle d’affaires de ce secteur qui avait déjà beaucoup évolué ces dernières années.

Bref quand le joueur n’a rien de passionnant à se mettre sous la souris, le chercheur a toujours quelque chose à décortiquer.

Merci Thierry. Dans notre prochain épisode : mon entretien avec Antoine BERNARD, étudiant à la Faculté des sciences humaines et sociales de Strasbourg et lui aussi membre de ce programme.

Cultures et mondes ludiques : Quand le jeu s’invite dans la recherche universitaire – Épisode 2

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